jeudi 8 octobre 2015

Débrouillardise à Conakry


Au niveau de chaque carrefour, des jeunes, dont l’âge varie entre 15 et 22 ans convertis en rabatteurs, s’activent à remplir chaque taxi qui se présente contre 500 Gnf. Ces jeunes, communément appelé ‘’Cokseurs’’ versent souvent dans l’abus en pénalisant les passagers pressés. Car, quand ils font rentrer un passager à bord d’un taxi, c’est comme un appât. Parce que le taxi ne bouge pas sans ses 500 Gnf et le chauffeur ne donne que si son véhicule est rempli. Donc, c’est le passager qui est pénalisé. ‘’Je fais ça pour subvenir à mes petits besoins que les parents ne peuvent prendre en charge. Si je ne vais pas en classe, je peux charger 20 à 30 taxis par jour vu la pléthore des Cokseurs. Sinon, avant on pouvait charger plus de 50 taxis par jour.’’, se décharge Amadou Oury Diallo, 19 ans, lycéen.


Les bordelais de Madina et les filles d’Avaria
Au marché de Madina, le  plus grand du pays, ‘’Avaria’’, où se vend les objets de seconde main ou avariés d’où son nom Avaria, et Bordeaux, nid des vendeurs de troisième main, forment une sorte de quadrilatère situé entre l’autoroute Fidel Castro, la route du Niger, la Sobragui, la plus grande brasserie du pays, et la gare routière nationale qui a été estropiée, question de diminuer le trafic afin de désengorger le coin qui était devenu trop restreint, d’il y a quelques années de cela pour être transporté à Matam.
A Conakry, si une fille n’a pas froid aux yeux et qu’elle parle sans complexe, on l’assimile souvent aux vendeuses d’Avaria. Car à Avaria, ce qui compte pour les vendeuses, que leurs produits soient écoulés. Un point c’est tout. Chaque vendeuse à son propre slogan pour écouler ses marchandises. De  passage, on ouïe, dans un brouhaha teinté d’ambiance, toute sorte de blague qui accompagne les marchandises. Mais ces slogans sont souvent chantés en Soussou, langue la plus parlée dans la capitale : Kha a gnon,  tina  amouna (si ça fini aujourd’hui, demain il y’en aura nulle part), Won m’mali dé,  n’gbata khi (aidez-moi, je suis pressé !), etc. Le tout accompagné de pas de danse ou de mouvement de corps juste pour mettre du tonus et de l’ambiance pour attirer plus de clients. On y aperçoit aussi des coiffeuses affairées et  autres maquilleuses. ‘’On travaille avec les grossistes, on n’a pas d’argent. Mais, il suffit juste d’être connu et crédible pour bénéficier de la largesse des grossistes. Nous, nous ne cherchons pas beaucoup d’intérêts. Raison pour laquelle nos marchandises s’écoulent vite. Moi, chaque jour, je prends la marchandise disponible au magasin pour la revendre. Car, personne n’a une marchandise fixe ici. Il faut faire avec. Tantôt c’est des habits, tantôt c’est  de l’alimentation générale.  Bref, on se débrouille avec ce qu’on a sous la main’’ explique Mamata Sylla, sourire aux lèvres, 23 ans.
Affairée entre ses produits cosmétiques et une cliente qu’elle tressait, Zenab Soumah, 25 ans, étudiante en droit des affaires ne tergiverse pas : ‘’Moi, je suis polyvalente. Je fais la coiffure, je maquille les gens et vend des produits cosmétiques. Quand je n’ai pas de cours à la Fac, je viens tuer le temps ici. Ce qu’on gagne ici n’est pas trop mais ça nous permet de boucher certains trous. Et, en tant que jeune fille, ça me rend indépendante des hommes. Car, de nos jours, la plupart des hommes  tripotent les filles pour des raisons pécuniaires. »

A ‘’Bordeaux’’  (Madina),  la quasi-totalité des jeunes branchés de Conakry s’y approvisionnent en vêtements, chaussures et pleins d’autres choses. A Bordeaux, il n’est point besoin de partir vers les revendeurs, il suffit juste d’y pointer son nez et vous êtes servi. Car, ici, la concurrence déloyale bat son plein. Avec une pléiade d’objets disponibles, on n’y rentre jamais et ressortir bredouille. Ne demandez surtout pas la provenance des marchandises. C’est strictement interdit. Ne dit-on pas qu’à chaque milieu ses règles de vie ? Tu veux, tu achètes et tu l’a ferme !
Pressé d’écouler les pantalons qu’il détenait, Facinet Diallo alias ‘’Nesta’’, 30 ans, diplômé en droit, nous confie : « nous nous ravitaillons chez les femmes  qui ouvrent les balles de friperie chaque jour. Nous prenons avec elles quelques habits et nous les revendons pour avoir des bénéfices. Il y a plusieurs catégories de débrouillards ici. Il y ‘en a qui revendent des téléphones de toute sorte et c’est parmi eux qu’il y a des fraudeurs. C’est-à-dire ceux qui monnayent des téléphones apparemment neufs, mais dont le moteur est complètement abimé. Et pire, s’ils te revendent, après quelques minutes, ils disparaissent de la circulation. Donc, si ce n’est pas par hasard, tu ne le reverras plus jamais. Il y a aussi d’autres qui revendent des ‘’Bourou bourouni’’ ou ‘’Gnama Gnama’’ (habits pour enfants). Ici, c’est un véritable ‘’Business Center. Moi, si ce n’est pas un boulot où on me paye à 5 millions de GNF, je ne vais pas ».
Kaba Ibrahima Sory

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